Les instants que nous vivons marquent une fois encore le douloureux épilogue d'un de ces drames dont les années d'occupation furent hélas si fertiles.
Joseph Martin dont nous recevons aujourd'hui la dépouille mortelle naquit à Salles-en-Toulon, près de Chauvigny, le 5 Avril 1922. Venu à Loudun à l'âge de 6 ans, l'école communale l'accueille pour lui apprendre ses premiers devoirs, de 12 à 14 ans c'est sur les bancs de notre collège que cet élève studieux et particulièrement doué pour le dessin se formera à l'école de la vie. Quittant cet établissement en 1936, il se perfectionnera à l'école d'Egletons dans la Corrèze pendant 4 ans.
1939 ! et c'est la guerre qui devait être terrible et meurtrière pour tant de foyers français.
Pendant 1 an nous retrouvons Joseph Martin aux P.T.T. de Loudun où il remplace son beau-père.
C'est de l'usine Rocher, à Cenon où il travaillait depuis quelques mois qu'il reçu à son tour sa feuille de départ pour l'allemagne et le 25 Février 1943 il quittait sa famille pour nous revenir aujourd'hui couché à tout jamais dans cette bière, innocente victime parmi les 50000 Déportés du Travail qui sont décédés là-bas.
Joseph Martin travaille d'abord à Neubrandenburg et ensuite à Stargard, près de Stettin, dans un bureau industriel, comme dessinateur.
Cette usine devait être bombardée en Octobre 1944 et il fut blessé en même temps qu'un camarade des environs de Loudun et durant 2 mois il resta couché sur un lit d'hôpital.
Début 1945 la débâcle allemande s'accentue et Joseph Martin voyage sur un train chargé de matériel récupéré de son usine, principalement de la ligne allant de Munich à Linz (Autriche). Un jour même ce convoi fuyant les bombardements passa la frontière et vint jusqu'aux portes de Strasbourg.
Et c'est sur un de ces trains fantômes que le Lundi de Pâques, 2 Avril, il devait succomber mitraillé par deux avions américains. Il avait 23 ans et attendait tout de la vie.
En ce jour du 14 Novembre je ne puis m'empêcher de jeter un regard en arrière et de songer qu'il y a 7 ans, le 14 Novembre 1942, le premier convoi important de Déportés du Travail de Loudun partait de cette même Mairie où nous avons accueilli Joseph Martin dans la matinée.
Madame, Monsieur, au nom de la Fédération Nationale des Déportés du Travail je m'incline devant votre grande douleur.
Repose en paix et sache que ton sacrifice n'a pas été vain, car si la cendre des morts a créé la Paix c'est elle aussi qui régénère un Pays.
"La Voix du Loudunais" renouvelle à M. et Mme Couanet et à leur Famille ses respectueuses et bien vives condoléances.